Après plusieurs semaines de réflexion autour de la fin de saison 2019/2020 et des circonstances de reprise pour le prochain exercice, Julien Desbottes s’adresse à nous dans un long entretien sur les décisions prises ces derniers jours, l’envie de rejoindre l’Europe, la situation du club et le visage du futur effectif.

Dans cette deuxième partie, le président de la JL Bourg Basket, Julien Desbottes, dresse les impacts de la pandémie du Covid-19 sur la saison 2019/2020 et 2020/2021. Il évoque également la relation du club avec ses abonnés et partenaires et pourquoi la Coupe d’Europe n’est pas à visualiser comme un danger pour les économies du club.

Concernant ses abonnés, le club a pris une décision forte très rapidement avec la possibilité d’un remboursement sur le prochain exercice ou d’une donation pour l’école des meneurs ou d’une imputation sur le prochain abonnement. Où en sommes-nous aujourd’hui ?

Nous attendions d’avoir la formule de championnat et maintenant de savoir si nous jouerons une Coupe d’Europe pour faire l’offre finale à nos abonnés. On ne leur demande pas de choisir avant d’avoir les règles du jeu. Imaginons que notre offre Europe soit très chère, je ne voudrais pas que certains aient abandonné leur abonnement et se disent par la suite que s’ils avaient su, ils auraient fait autrement.

J’ai voulu prendre date très tôt pour dire à nos abonnés qui représentent 850 personnes qu’on les aime, qu’on tient à eux et que c’est le club qui, via ses réserves économiques et ressources financières, fait un pas vers eux. Ils pourront alors utiliser leur avoir de 20 % à périmètre Jeep Elite pour reprendre leur abonnement la saison prochaine. On leur a dit aussi que pour l’Europe ça sera valable, et qu’enfin pour aider le développement du club, ils pourraient donner toute une partie à notre école des meneurs parce qu’on sait que pour pouvoir progresser, il faut structurer et investir au sein de la formation et qu’on a besoin d’argent pour cela. On n’a pas de retour statistique parce qu’aujourd’hui, on n’a pas encore demandé spécifiquement à chaque abonné de le faire. Dès lors qu’on saura si on fait l’Europe et quelle Europe, car ce n’est pas impossible qu’on joue l’EuroCup, on transférera l’offre aux abonnés pour leur demander de se positionner. Je tenais beaucoup à ce que ça aille jusqu’au remboursement. Il faut savoir qu’une loi sur le sport devrait être votée dans les prochaines semaines. Elle va se calquer sur le modèle du tourisme, qui a été très touché par la Covid, où par exemple lorsque vous avez un billet d’avion, le délai de remboursement est de dix-huit mois pour encourager les gens à utiliser ce billet. Ainsi, pour protéger les clubs, il est fort probable que cela arrive pour le sport. Mais moi je ne me voyais pas me cacher derrière la loi en proposant 20% de remboursement seulement dans dix-huit mois si vous décidez d’arrêter votre abonnement. Je voulais donc envoyer ce message fort.

La conjoncture soulève des questionnements au niveau économique. Pour la saison 2019/2020, peut-on estimer le manque à gagner pour le club ?

Il nous restait quatre matchs à faire donc il va nous manquer un gain au niveau de la billetterie, au niveau des 20 % qu’on va rembourser aux abonnés et puis ce qu’on va traduire pour nos partenaires. Pour eux aussi, on réfléchit beaucoup pour trouver la meilleure solution possible donc ce dont on a convenu c’est qu’il y ait 100% de ce qu’on devait leur fournir individuellement sur les quatre derniers matchs qui leur sera offert sur les quatre premiers matchs de la saison prochaine. Dans l’ensemble on va être dans une solution hyper flexible et l’impact global pour les partenaires, comme il y a des événements BB+, de la visibilité via les réseaux sociaux et pendant les matchs, on n’est pas strictement à 20%. La matrice est beaucoup plus complexe et globalement quand je prends tous ces impacts, on est autour de 800 000 euros, hors Play-offs, dans le cas où tout le monde choisirait le remboursement total de l’ensemble des prestations. 

La JL base une grosse partie de son budget sur des fonds privés, quelle a été la relation avec les partenaires durant cette période ? Comment la JL travaille-t-elle avec ses partenaires et BB+ pour la saison prochaine ?

partenaire JL
La JL Bourg tient à soutenir ses partenaires ©Christelle Gouttefarde

Pour eux aussi on attendait d’avoir la formule de championnat et maintenant l’Europe ou pas l’Europe qui peut correspondre à cinq matchs supplémentaires (NDLR : Cas de la BCL) ou sept matchs supplémentaires (NDLR : Cas de l’EuroCup) à Bourg. On temporise ainsi encore un peu et on n’est pas encore rentré dans une phase de négociation à ce jour. Néanmoins, nous avons deux mots d’ordre. Le premier est de fournir les prestations de chaque rencontre afin d’être tout à fait “clean” sur ce qu’on devait leur proposer. Ainsi, celui qui devait être parrain le sera lors des premiers matchs, celui qui devait avoir une soirée spéciale la fera, etc. Une sorte de mise à jour au plus proche de ce qu’on devait. Le deuxième est la flexibilité. Au moment où je parle, nous avons presque finalisé la construction d’une offre à tiroir qui dit que si vous pouvez augmenter votre budget pour aider le club dans cette crise, alors nous allons doubler la mise avec plus d’offert et de gratuit. Si vous pouvez maintenir votre budget, alors on vous offre l’Europe si on la joue soit une saison à vingt-quatre matchs pour le prix de dix-sept l’année dernière (sans compter la réduction de l’exercice précédent). Il y aura aussi la possibilité d’un paiement étalé en huit fois. Si vous devez baisser votre budget, vous aurez la Jeep Élite, voire un autre type de prestation. En somme, il y a toute une arborescence pour dire qu’il faut absolument qu’on tende la main à nos partenaires et que c’est au club de faire les efforts financiers pour leur permettre de rester partenaires chez nous. Nous avons une très bonne assise financière, car ils nous ont beaucoup donné ces dernières années et cette année, on va leur rendre. Nous aussi on est en galère, mais on a un enthousiasme, je l’espère, autour de notre club qui va nous permettre de continuer à avancer et de défendre nos intérêts communs.

"Une masse salariale qui baissera de 10 %"

Pouvons-nous avoir une perspective de budget pour la saison prochaine ? Celui-ci va-t-il varier selon la qualification ou non pour une Coupe d’Europe ?

Le modèle Europe, compte tenu de ce qu’il s’est passé et compte tenu de ce qu’on veut proposer à nos partenaires, on a pour but qu’il y ait une forte adhésion et donc on va rendre l’Europe accessible du point de vue économique pour essayer de relever un challenge fort : avoir un fort taux de remplissable pour les matchs européens. Avec les frais de déplacement et d’organisation de match, ça ne nous générera pas de profit puisqu’on va faire des efforts tarifaires pour que tous puissent bénéficier de bonnes conditions. Notre masse salariale ne changera pas entre les deux formats, mais elle baissera de 10 % par rapport à l’année dernière. Encore une fois, l’objectif est de dire “si d’autres baissent de 25 %, alors de notre côté, il faut que nous soyons meilleurs”. Je veux absolument qu’en sortie de crise, le rang de la JL au plan économique dans l’échiquier des clubs de Jeep Elite soit meilleur qu’avant. Nous aurons peut-être moins de ressources en euros, mais on sera peut-être sixième au lieu de dixième. Le pire, c’est qu’on va y arriver !

D’ailleurs, certains clubs se questionnent sur les répercussions d’une Coupe d’Europe sur leur budget. Y a-t-il un aspect négatif à jouer ce type de compétition dans le contexte actuel ?

Le but cette année c’est que l’Europe s’auto-suffise, mais je pense qu’il ne faut pas trop mélanger les genres. À un moment il y a l’économique et il y a le sportif. Quand on franchit des marches sportives, quand on change de division, quand on passe à l’Europe, ce qui n’est jamais arrivé pour un club à Bourg-en-Bresse. Jamais ! Quand on nous propose de participer à une compétition où la JL Bourg va représenter la France. (il répète). C’est-à-dire que certaines personnes de la région vont encourager la JL alors que le week-end on joue contre eux et ils seront contre nous, mais le mardi ils vont nous regarder à la télé et se dire “on est derrière, car on est français”. Qu’on vienne me dire, “qu’est-ce que ça coûte ? Qu’est-ce que ça rapporte ?”, pour moi, cela serait comme refuser une montée donc impensable. On a bien un objectif économique qui est d’équilibrer le fonctionnement de l’Europe, mais cela reste très accessoire par rapport à ce que ça représente au niveau sportif.

Par mon métier (NDLR : Expert-comptable), j’ai toujours été sur l’équilibre entre la raison et la passion ce qui représente un fossé à droite où il y a la partie économique et un fossé à gauche où il y a la partie sportive. Pour pouvoir avoir la meilleure équipe possible, la meilleure infrastructure possible, les meilleures animations possible, j’oscille entre les deux. Mais au niveau de l’Europe, je me permets une sorte de parenthèse et un traitement à part entière, car ça n’est jamais arrivé ! Je suis donc content d’être président à ce moment-là et c’est ce qui m’anime. Je me positionne plus du côté du fossé de la passion que de la raison et si à la fin l’Europe nous coûte 50 000 euros sur un budget d’un peu plus de 5 millions, je prends acte et on gagnera sur le reste et on trouvera des économies pour faire fonctionner l’ensemble, mais c’est tellement beau que ça ne peut pas se refuser. Aujourd’hui, ce n’est pas le moment de compter.

Je pense que le débat n’est pas là où il devrait être lorsqu’on parle de l’Europe sur le sujet économique. C’est Bourg-en-Bresse qui pourrait jouer contre Athènes. C’est extraordinaire. D’ailleurs il faut savoir que si on joue l’Europe, on aura le drapeau bleu-blanc-rouge sur notre maillot. C’est un symbole et c’est aussi beau que lorsqu’on a fait notre première finale de la Semaine des As, notre finale de l’année dernière en Leaders Cup, toutes les montées successives qu’on a pu vivre. Il faudra que les gens profitent pleinement de ce que cela représente et qu’ils ne soient pas dans le calcul. J’y mets beaucoup de cœur. C’est comme se dire si c’est une grosse ou une petite Coupe d’Europe, car on rentre dans une compétition (dans les formats actuels) qu’aucun club français n’a jamais gagnée. Quand le PSG a gagné la Coupe des Coupes quand j’étais gamin, on peut se dire que c’est nul, mais Lyon, ils ont déjà gagné la Coupe des Coupes en foot ? Je pense qu’ils aimeraient bien gagner n’importe laquelle des Coupes d’Europe. Il faut arrêter de faire la fine bouche et se rendre compte de ce que ça représente. Je suis super content et je suis très fier que notre public puisse voir ce que c’est que du basket européen, espagnol, allemand… Changer un peu notre grille de lecture sur les compositions d’équipe, les formats de compétition qui sont moins athlétiques, d’autres formes de jeu. Le sujet c’est des étoiles dans les yeux, la JL qui représente la France et derrière cela, il n’y a rien qui compte.

Dans la dernière partie, nous nous projetterons sur l’exercice 2020/2021 et les perspectives envisagées pour les prochaines saisons à la JL Bourg.

Propos recueillis par Corentin Maréchal
©Jacques Cormarèche

 

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